lundi 5 mai 2014

Meurtres dans la 110ème rue (1972)


Meurtres dans la 110ème rue, véritable polar urbain, à la violence sèche dont l'intrigue se passe à New-York dans le quartier Afro-Américain, d'Harlem. Le long-métrage est produit par sa tête d'affiche, l'immense Anthony Quinn.

Son cinéaste Barry Shears, également producteur pour la télévision, est connu pour avoir réalisé pendant deux décennies - Les années 60 à 70 -, de nombreux épisodes de séries télévisées cultes aujourd'hui, mais également des téléfilms Américains : D'U.N.C.L.E - des Agents très Spéciaux, à L'Homme de Fer, d'Hawaii Police d'État en passant par Les Rues de San Francisco & Les têtes brûlées. Sans oublier, Starky & Hutch, dont il a la responsabilité du pilote.

Pour les salles obscures, Barry Shears réalise Les troupes de la colère en 1968 chez America International Pictures, un studio de cinéma habitué aux B-Movie, double features et autres Midnite Movie. L'artisan signe quelques années plus tard, en 1973, un shérif ne pardonne pas avec le grand Samuel Fuller, cinéaste connu pour des chefs-d'oeuvre comme Police spéciale, Dressé pour tuer & Shock Corridor. Long-métrage souvent considéré comme appartenant au genre de la Blaxploitation. Certainement dû au lieux ou se passe l'intrigue : Harlem. Meurtres dans la 110ème rue, reste à la limite du genre



À la veille de la retraite le Capitaine Frank Matteli, en poste à Harlem depuis des années se voit confier une sale affaire : Un braquage particulièrement sanglant dans une planque de la mafia Italienne, causant sept morts dont deux officiers de policiers. Contraint de faire équipe avec le lieutenant Pope, les deux hommes sont décidés à retrouver les trois braqueurs. De leur coté, le syndicat du crime aidé par un gang d'Afro-Américain, ayant la main mise sur le quartier, cherchent les responsables de cet acte. Harlem devient alors un champs de bataille…

La séquence d'ouverture s'ouvre sur le magnifique morceau de Bobby Womack Across the 110th Street. Repris presque vingt ans plus tard par Quentin Tarantino, pour Jackie Brown.

L'intrigue principale n'est pas spécialement originale. La force de Meurtres dans la 110ème rue, est sa grande justesse d'écriture dans le traitement de ses différents personnages. Frank Matteli interprété par Anthony Quinn est un flic raciste de la vieille école, utilisant des méthodes rustres : Il tape avant de poser les questions. Pour des raisons politiques - La mairie de New-York se souvient des violentes émeutes d'Harlem en 1968, suite au décès de Martin Luther King Jr - sa hiérarchie demande au vieux renard de laisser l'affaire au lieutenant Afro-Américain, M. Pope, jeune policier intègre, n'aimant pas être appelé "Brother" par ses semblables. Au contact de son coéquipier, ce ripoux de Frank Matteli montre petit à petit son humanisme, en donnant à une mère vivant avec sa petite fille, l'argent retrouvé sur la dépouille de son ancien mari.

De l'autre coté, la mafia Italienne avec Nick D'Salvio, l'ambitieux gendre du parrain local, ayant le "nigger" facile. Ce ringard sera remis à l'ordre par le véritable patron d'Harlem, "Doc" Johnson, un caïd arrosant toute la police, même Frank Matteli, sans oublier la population, offrant même cent dollars pour des informations sur les trois braqueurs en cavale.

La 110ème rue à Harlem symbolise une frontière entre ce ghetto pauvre et les résidences aisées près de Central Park. La tension raciale est véritablement palpable tout le long de l'intrigue. Meurtres dans la 110ème rue, dénonce le racisme, ce fléau latent, omniprésent dans la société Américaine de l'époque. Sur les murs des bureaux de Doc Johnson, on peut apercevoir les grands noms de la cause Afro-Américaine, de Martin Luther King Jr, en passant d'Angela Davis à Malcom XLes dernières minutes, sont surprenante. Avec ce magnifique plan final symbolique, ou ce vieux flic raciste, Frank Matteli donne la main son collègue Afro-Américain, le lieutenant Pope. L'accolade d'un Blanc et d'un Noir, le temps d'un dernier souffle sur un toit d'Harlem maculé de sang.

Affiche Italienne

La réalisation de Barry Shears, est efficace, sèche et énergique. La tension lors du braquage est véritablement palpable, avec cet enchainement de plan rapide sur les visages des comédiens, à la façon de Sergio Leone lors des duels. La mise-en-scène urbaine est cru, souvent filmé caméra à l'épaule.

Meurtres dans la 110ème rue, est le premier long métrage, à utiliser l'Arriflex 35BL. Une caméra portative 35 millimètre auto-silencieuse de la marque Arri, sa taille très réduite a servit à l'équipe de production notamment pour la synchronisation du son et à donner cette impression quasi-documentaire aux spectateurs, avec ce drôle de sentiment d'arriver presque à ressentir le bitume New-Yorkais. En France elle fut l'objet de prédilection de cinéastes comme Claude Lelouch & Jean-Luc Godard.

L'Arriflex 35BL dans les rues d'Harlem, lors du tournage de Meurtres dans la 110ème rue.
Un véritable déferlement de violence défile à l'écran. Avec certains plans vraiment brutaux pour l'époque, comme la scène de l'ambulance, après son passage à tabac, Henry J. Jackson, se retrouve la tête ensanglantée, et les yeux percés. Lors des dernières minutes, le spectateur assiste à une guerre urbaine en plein Harlem, dans un ghetto abandonné, avec en point d'orgue, ce plan symbolique : Jim Harris, le dernier braqueur en vie, jette l'argent du toit, tombant ainsi dans un terrain de basket ou des enfants défavorisés jouent.

Affiche Japonaise
Les dialogues sont excellents rattrapant ainsi une intrigue principale convenue, comme la succulente confrontation verbale et tendue entre Frank Matteli & "Doc" Johnson.

Le long-métrage possède de véritable gueules d'acteurs. À commencer par l'immense, Anthony Quinn. Son coéquipier le lieutenant Pope est joué par le comédien, Yaphet Kotto, célèbre pour son rôle du dr Kananga dans James Bond : Vivre et laisser mourir. Coté second rôle, Anthony Franciosa, est Nick D'Salvio, le caïd italien grande gueule, au drôle de tic. On retrouve aussi Antonio Fargas, connu du grand-public pour son rôle d'Huggy les bon tuyaux dans la série télévisée Starky & Hutch. À noter, l'apparition anecdotique au début de Burt Young - Paulie dans la saga Rocky.

Les compositions de Bobby Womack & JJ. Johnson, sont excellentes, collant parfaitement à l'ambiance chaude du quartier d'Harlem. Les amateurs et les amoureux de Soul-Music, seront aux anges.

Meurtres dans la 110èmerue, est un polar urbain violent & sec. La réalisation de Barry Shears au style quasi-documentaire, est ancrée dans son époque. L'intrigue aborde les thèmes du racisme et des ghettos Afro-Américains dans les grandes cités Américaines, ici, New-York, avec le quartier d'Harlem. Un long-métrage dans la droite lignée de ceux des années 70, une petite pépite explosive à découvrir rapidement.

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