dimanche 17 juin 2012

Balada Triste de Trompeta (2010)


Balada triste de trompeta est un véritable O.F.N.I (Objet Fou Non Identifié) cinématographique réalisé par le talentueux Álex de la Iglesia, auteur des génialissimes le Crime Farpait & 800 balles.

Le récit raconte le combat amoureux de deux clowns, l'Auguste & le clown triste, se battant pour obtenir l'amour d'une seule et unique femme, la magnifique Nathalia, sous le régime Franquiste pendant les 70's en Espagne.

Le long-métrage est un mélange intelligent de plusieurs genres comme la guerre, l'horreur, le drame et la comédie noireÁlex de la Iglesia réalise avec Balada triste de trompeta une oeuvre politique, son générique en est la preuve.

Dés l'ouverture on est plongé dans la guerre civile Espagnole, l'histoire se déroule en 1937 avec une troupe de cirque réquisitionné de force pour combattre les Franquistes, on retrouve un clown en tutu massacrant une horde de soldats à coup de machette, la scène se termine avec le fameux clown prisonnier par les troupes de Franco. À lieu alors une ellipse de vingt-cinq ans, nous sommes dans les années 70 C'est alors que le long-métrage se dirige vers une toute autre direction scénaristique. On retrouve Javier, le fils du clown, qui est engagé dans un cirque à Madrid, le garçon tombe amoureux de Nathalia, trapéziste de la troupe, qui est dans une relation avec l'Auguste, un homme psychopathe, colérique et abusant de l'alcool. La jeune femme devra choisir entre un amour naïf ou une relation sadomasochisme violente.




Balada triste de trompeta est une œuvre baroque d'une grande noirceur, voir anxiogène par certains cotés, accompagnée d'une touche d'humour noir, cher au cinéaste, avec une pointe d'ironie macabre. Le long-métrage est au final une véritable peinture nihiliste de la société humaine. Par certain coté, ce film nous fait penser à Mort de rire du même réalisateur.

L'évolution de Javier, le clown triste est intéressante, le spectateur assiste à sa transformation en pur monstre de foire, rappelant Freaks - la monstrueuse parade de Tod Browning. Le spectateur à une relation ambiguë avec ce personnage, sommes nous d'accord ou contre avec ses actes ?! 

Ses émotions sont retranscrites à la perfection dans les paroles de Balada de la trompeta, chanson de Raphaël, Javier est un garçon qui n'a jamais connu de jeunesse. Le cinéaste explore les sentiments les plus sombres, voir animal à certain moment de l'être humain, comme la séquence dans les bois ou la chasse avec Franco.

Nous retrouvons également l'une des thématiques chères du cinéaste Hispanique : Les Femmes, sujet déjà abordé dans ses œuvres notamment Le Crime Farpait. Nathalia, est un personnage très complexe à la fois manipulatrice possédant ce coté masochiste, et cet amour violent pour l'Auguste. Elle jette son dévolue sur le clown triste pour son coté gentil et doux, Javier devient alors obsédé par la trapéziste, devenant fou. La jeune femme mène finalement les deux hommes à la destruction… Un véritable triangle amoureux sadique.


D'un point de vue visuel, Balada triste de trompeta est esthétique, sublime comme souvent chez Álex de la Iglesia, le spectateur est subjugué par les différents cadrages iconiques. Les maquillages des personnages sont très réussis. La photographie et l'image sont travaillées avec plusieurs teintes pour les différentes époques. A la limite du noir & blanc pour la guerre civiles en 1937. Concernant les années 70, nous avons droit à une colorimétrie plus chaude et chaleureuse. Ces éléments donnent une sacrée teneur au récit.

La valle de los caidos, oeuvre controversée 
construite sousle régime du général Franco, 
pour les soldats morts pendant
la guerre civile Espagnole 
Comme je le disais plus haut, le cinéaste nous livre donc un pamphlet politique en toile de fond, avec l'histoire espagnole et le régime autoritaire du généralissime Franco. La construction du titanesque monument de la sainte croix situé dans la valle de los caidos, destiné aux soldats morts pendant la guerre civile espagnole.

Les différents documents d'archives diffusés lors du générique d'ouverture, présente le tourisme se développant dans les seventies sur les rivages Espagnole, Álex de la Iglesia indique que l’Espagne est une dictature ouverte au monde extérieur, mais totalitaire sur sa population et liberté d'expression. 

Lors d'une scène, le personnage de Javier assiste malgré lui, à l'attentat de l'E.T.A le 20 décembre 1973 à Madrid sur la personne de l'amiral Luis Carrero Blanco, qui était le président du gouvernement nommé par Franco malade. Avec ces différents éléments, le réalisateur traite du fascisme qui rongea le pays pendant presque quarante années.

Dans Balada triste de trompeta, le cinéaste fait plusieurs clins d'oeil, à la pop-culture des années 70, comme le cabaret à l’effigie de Kojak, célèbre personnage télévisé interprété par le comédien Telly Savalas. Dans le générique d'ouverture, apparaissent plusieurs artistes comme le Salvatore Dali ou les Beatles. Le réalisateur évoque le comics Ghost Rider de Marvel, avec le motard de la troupe. La conclusion se déroule à la sainte croix de la valle de los caidos, l'escalade du gigantesque monument fait penser à King Kong au dessus de l'Empire State Building ou l’ascension du Mont Rushmore dans la mort au trousse

Álex de la Iglesia réalise une perle noir ! Une œuvre sombre et désespérée, possédant une conclusion magnifique au allure poétique. Dans un cinéma actuel trop conformiste, le cinéaste nous propose un long-métrage anxiogène avec de l'ironie, un humour macabre... Bref Balada triste de trompeta est à voir absolument.

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