dimanche 10 août 2014

Golgo 13 (2008) - partie 1 -

Golgo 13, véritable oeuvre charnière dans la longue carrière de son auteur le grand Takao Saitô. Le mangaka est l'un des représentants du mouvement gekiga, un courant réaliste et adulte de la bande dessinée Japonaise né à la fin des années 50. 

La première aventure du célèbre Duke Togo apparaît le 29 Novembre 1968 dans les pages du Big Comics Spirits de l'éditeur Shogakukan. Depuis son ombre plane toujours sur l'archipel avec plus d'une centaine de mangas publiés, devenant ainsi l'une des oeuvres les plus longues de l'histoire sur ce format, avec Kochi-Kame.

Les aventures de ce tueur-à-gage free-lance ont connu plusieurs adaptations en longs-métrages chez Tôei Company. En 1973, avec un premier film appelé sobrement Golgo 13, dans le rôle titre nous retrouvons le grand Ken Takakura. Quelques années plus tard arrive dans les salles obscures, Golgo 13 : Assignment Kowloon, réalisé par Yukio Noda avec Sonny Chiba dans la peau de notre héros.

Quant à l'animation, deux oeuvres ont été signées par le célèbre duo Osamu Dezaki & Akio Sugino, connu pour la mise-en-scène Space Adventure Cobra, L'île au trésor ou encore Ashita no Joe 2. Les deux hommes signent en 1983, Golgo 13 : The professionnal, premier film d'animation Japonais à intégrer des images de synthèse, un véritable choc pour les spectateurs de l'époque. Et en 1998, le duo revient avec les magnifiques OVAs de Golgo 13 : Queen Bee. Il faudra alors être un peu patient pour que notre tueur professionnel taciturne décide de revenir sur le petit écran, et c'est le 11 Avril 2008 qu'il décide de réapparaître sur TV Tokyo avec une série télévisée de cinquante épisodes sobrement appelé : Golgo 13.

Édition Française disponible chez Black Box.

Duke Togo, plus connu sous le pseudonyme Golgo 13, est un tueur-à-gage sombre et amoral à la réputation mondiale. Sniper d'élite, cet homme ne recule devant rien et ne rate jamais sa cible. Des règles encadrent sa vie, et dès qu'un contrat est signé, Golgo 13 va jusqu'au bout.

En digne héritier du mouvement gekiga, Golgo 13 aborde des thématiques instaurées par ce courant de pensé datant de la fin des années 50 : 

"Les préoccupations écologiques, économiques et politiques de notre époque, fondement du lien social, mais aussi de la complexité de la nature humaine". Cette phrase résume parfaitement la série télévisée adaptée de l'oeuvre de Takao Saitô.

Le spectateur suit les aventures de ce fameux tueur-à-gage d'origine Japonaise, Duke Togo. Cet homme taciturne accepte des contrats d'assassinats, avec à la clés une forte rémunération de trois millions de dollars, ses clients sont généralement des personnalités peu scrupuleuses (mafieux, show-business…) ou des employés d'administration gouvernementale. Pour accomplir à bien ses contrats, Golgo 13 voyage au quatre coins du globe entre Paris, Hong-Kong, Londres, Malte et les grandes mégalopoles d'Amérique du Nord comme New-York, Chicago, Washington D.C ou Honolulu.

Tel Gérard de Villiers et ses fameux romans SASTakao Saitô se tient au courant de la géopolitique mondiale et des relations internationales complexes :

Ainsi au détour d'"Un tir sur la corde de sol" (Épisode 7), nous avons droit à une référence à l'empoisonnement et la mort à Londres de l'ancien espion Russe Alexandre Litvinenko. Cette même mission nous présente le violoniste Sergei Kerensky opposant au régime et à la politique de Vladimir Poutine. Dans "Eva, vers la mer" (Épisode 15), lorsque l'équipage du navire de croisière apprend qu'une bombe est à bord, l'un des officiers mentionne que l'auteur de cet acte est l'un des hommes en rapport avec les attentats-suicides de Londres de 2005. Ces fait réel permettent ainsi d'ancrer Golgo 13 dans l'air du temps et d'établir ainsi la crédibilité des différentes intrigues.

Toujours dans cette recherche de réalité, ou de réalisme, différents organismes publics parcourent les récits. Bien sûr nous avons droit aux sempiternelles F.B.I et C.I.A, mais d'autres organisations gouvernementales moins connues du grand-public sont présentes :

Comme le S.E.C - Securitie and Exchange Commision - organisme fédéral Américain de réglementation et de contrôle des marchés financiers. Ces membres ordonnent à Duke Togo dans "La chambre 909" (Épisode 2) d'éliminer Robert Horton, un puissant mafieux qui a étendu son influence jusqu'à Wall Street. Lors de "L'ombre mortelle du soleil couchant" (Épisode 14) un mystérieux homme mentionne le D.O.J - Department Of Justice -, cette institution exécutive du pouvoir est dirigée par le procureur général des États-Unis qui est nommé par le président (avec confirmation du sénat), siégeant ainsi de droit dans son cabinet, et depuis 1950, il est secondé par un procureur général adjoint.

Les Britanniques et les services secrets de sa majesté ne sont pas oubliés, loin sans faut. Outre la mention de Scotland Yard dans "Courant-Jet" (Épisode 23), le S.I.S - Secret Intelligence Service - prend contact avec Golgo 13 pour éliminer des pirates de l'air qui ont détourné le même avion que le sien. Bien sûr, notre tueur d'élite accomplira à bien sa mission malheureusement pour les ravisseurs. Fondé en Octobre 1909, le S.I.S également connu sous le dénomination MI6 - Military Intelligence : section 6 - est le service de renseignements extérieur du Royaume-Unis sont but est de protéger toute attaque terroriste extérieure et de conduire des activités d'espionnage à l'étranger. Le MI5 a pour lui, de veiller sur la sécurité des concitoyens à l'intérieur des frontières du pays.

De nombreux héros de fictions ont travaillé pour cette agence de renseignements Britannique. Parmi ces personnages connus nous retrouvons, le capitaine du MI5 Francis Blake, de la bande dessinée Blake et Mortimer d'Edgar P. Jacob. Ou le célèbre James Bond, l'agent 007 des romans (Et des films) de Iam Fleming.


Qui dit tueur professionnel, dit bien évidemment armes à feu !.

Le M-16 customisé est l'une des pièces maîtresse de Golgo 13 et du manga de Takao Saitô. Le mangaka possède d'ailleurs de véritable réplique de fusil et de pistolet dans son atelier de travail. D'ailleurs en feuilletant les pages, vous pourrez remarquer à quel point le détail et le soin sont apportés sur les armes à feu.

Dans "Le chef d'oeuvre des fusils d'assauts" (Épisode 3) le spectateur assiste à un véritable cours d'histoire du fusil d'assaut. Pendant la seconde guerre mondiale, l'armée Allemande développe une nouvelle arme automatique, le MP-43. Celui-ci donne naissance en U.R.S.S au fameux AK-47, au G-3 Allemand, au FAL Anglais et au M-16 Américain. Les années 70 ont vu l'essor des fusils d'assaut bullpup. Leurs principales différences avec les M-16, sont l'intégrations du système de tir mécanique dans la crosse. L'arme est plus petite et mieux adaptée aux combats rapprochés. Mais l'ancien fusil Américain continue à faire ses preuves malgré tout, comme lors de la guerre du Viêt-Nam.

Une séquence de préparation de matériel

Depuis 1968, l'oeuvre de Takao Saitô ancre ses racines dans le gekiga et n'hésite pas à aborder des sujets d'actualités ou dénoncer les maux de notre société contemporaine, il est donc normal qu'ici la série télévisée aborde des thèmes sociaux :

L'immigration Sud-Américaine aux États-Unis avec "Poursuite en Floride" (Épisode 25) en passant par l'endoctrinement de dangereuse secte - "Le saint à l'odeur de mort" (Épisode 16).

La corruption des élites et de la police est également dénoncées comme dans l'"Été Indien" (Épisode 22). Perdu au fin fond de l'Utah, un shérif local monte un coup avec deux hommes dans la ville Reno afin de dérober de l'argent d'un casino appartenant à la mafia. L'administration gouvernementale Américaine est aussi concernée, les hautes instances et le pouvoir en place n'hésitent pas à rétrograder un agent au sein du F.B.I, lorsque celui-ci se donne comme point d'honneur d'envoyer Duke Togo sur la chaise électrique - Dernières lueurs (Épisode 17).


La série  comporte quelques Harmony-Cell.
 Un clin d'oeil à Osamu Dezaki & Akio Sugino ?!
Duke Togo est un tueur professionnel hors pair, aux capacités physiques et aux réflexes surhumain, il peut abattre trois hommes à un intervalle de 0,17 secondes.

Golgo 13 est également implacable, sans pitié, autant avec ses cibles, - Hommes ou femmes - et ses adversaires, voir confrères. Lors de ces meurtres méticuleux, celui-ci à pour habitude de ne laisser aucun témoin lors de ses agissements comme dans "Angle croisé" (Épisode 13).

Les nombreux assassinats de Duke Togo peuvent-êtres assimilé à du terrorisme au yeux de certaines personnes, mais ce sniper d'élite n'a aucune idéologie et ne prend part à aucun conflits armés dans le monde. Golgo 13 fait ainsi preuve d'une neutralité exemplaire, son seul but est de réussir ses missions peu importe ses cibles car pour lui : "Les serpents, les chiens, les hommes… nous sommes tous les mêmes. Il ne reste que des corps au final."

De temps à autre, cet homme taciturne fait preuve d'un peu de compassion envers des clients démunies, voir impuissants face à de dangereux ennemis comme dans "Garimpeiro" (Episode 21). C'est alors que son immense carapace se fissure très légèrement et notre tueur-à-gage se montre d'une morale exemplaire pour aider la veuve et l'orphelin.

D'où vient le pseudonyme de Golgo 13 ?! Certainement à une référence à la colline Golgotha, lieu de la crucifixion de Jésus Christ. Ce mot dérivé de l'Araméen Gulgūltá et de l'hébreu biblique gulgōlet, signifie en grecque, "crâne". Ce site à l'extérieur de Jérusalem était connu pour être l'endroit des condamnations du pouvoirs Romain. Quant aux chiffres "13", celui-ci peut-être également lié à la bible pour la Cène, dernier repas du Christ ou tout simplement au célèbre chiffre porte-bonheur. Le titre du manga (Et de la série télévisée) est affublé d'un squelette avec sur la tête une couronne d'épine… s'agit-il du Christ ?

« Alors Pilate prit Jésus, et le fit battre de verges. Les soldats tressèrent une couronne d'épines qu'ils posèrent sur sa tête, et ils le revêtirent d'un manteau de pourpre »

— Évangile de Jean, 19:1 et 2

Le logo de Golgo 13, une référence
Christique ?

Certains clients de Duke Togo montrent l'avidité et les bassesses de la nature humaine. Comme dans "Un tir sur la corde de sol" (Épisode 2), une intrigue ou l'on peut y déceler un soupçon de morale digne de l'esprit d'Osamu Tezuka… Lors d'une représentation la corde du violon de Thomas Simpson un violoniste soliste réputé se brise, l'artiste reçoit l'impact des spectateurs présents sur place. Depuis cet incident, l'homme est incapable de jouer et de tenir son rôle pour un concert de charité, celui-ci doit céder sa place à Sergei Kerensky, son rival Russe. Il décide de faire appel à Golgo 13 afin de lui faire vivre la même expérience…


D'autres récits ont un déroulement nihilistes à souhait ou l'on sait d'avance que le destin des différents personnages sera sans issue, comme dans Pretty Woman (Épisode 4) où Linda, une ancienne prostitué devenue la femme d'un puissant patron de la mafia veut éliminer son mari jaloux afin de retrouver sa liberté. Celle-ci ne supporte plus les attouchements sexuelles de son époux envers sa personne. Pour parvenir à le tuer, elle embauche notre impitoyable tueur…

Dans les différentes intrigues qui composent la série télévisée, il arrive de temps en temps que Duke Togo soit soupçonné par les forces de l'ordre de meurtre. S'engage alors un véritable jeu du chat et de la souris tenant ainsi en haleine le spectateur.

Par exemple dans "Touch Down" (Épisode 12), lorsqu'un inspecteur de police à mi-chemin entre le sosie graphique de Clint Eastwood et aux méthodes d'instigation digne de Columbo se fit à son instinct pour trouver le responsable du meurtre d'un joueur de football Américain. Alors que son supérieur hiérarchique mise uniquement le résultat de l'enquête sur des nouvelles technologies digne du feuilleton Les Experts - CSI. Personne n'est infaillible, même Golgo 13… Notre tueur arrive à commettre une erreur dans "La chambre 909" (Épisode 2), chose rare pour un tel professionnel, et voit ainsi arriver débarquer des officiers de police dans sa chambre d'hôtel. Mais la distance - un seul angle de vue entre deux hôtels - et des rafales de vent, laisse très vite penser qu'un tel assassinat est impossible.

Ce sniper d'élite est également confronté à sa réputation internationale, lors d'une convention de nomination présidentielle Duchess fameux expert de la lutte anti-terroriste du F.B.I, remarque Duke Togo dans la foule et le fait suivre immédiatement par ses hommes - Offrande à Dieu (Épisode 6).

Cette adaptation télévisée de Golgo 13 est la digne héritière des formula-show des années 70 à 90 comme Lupin III ou City Hunter. Pour les différentes intrigues les scénaristes ont repris quelques histoires déjà pré-publiées dans le Big Comics Spirits. Seul point négatif, les scénarios sont conçu pour tenir en vingt minutes et ne rendent pas forcément justice à la complexité dont fait parfois son homologue papier.  

La réalisation tient assez bien la route, et l'on ressent une volonté de suivre l'exemple des précédents travaux d'Osamu Dezaki - l'écran splitté & les Harmony Cell. Normal, l'homme derrière cet adaptation n'est autre que Shunji Ôga, un ancien transfuge de TMS ayant travaillé avec le duo vedette du studio sur des oeuvres comme Ashita no Joe 2, Lady Oscar, Space Adventure Cobra et surtout Golgo 13 : The professionnal.

Une mise-en-scène inventive.
Les quatre premiers épisodes sont assez mou du genou en matière d'animation, malgré quelques effets 3D assez réussi. Golgo 13 débute donc sur des sentiers moins propices aux éloges, mais l'équipe trouve son style avec des graphismes et une mise-en-scène soignée. Pour palier à un manque de budget évident, la réalisation devient inventive au fil du temps comme "Le retour de la cible" (Épisode 10).

Character-design de Kazuyoshi Takeuchi (Flag, Lupin III : Bye Bye, Lady Liberty) respect parfaitement le trait rétro du mangaka Takao Saitô. Je me doute bien que certaines personnes peuvent être rebutées par cet aspect graphique "vieillot", et tellement loin des critères et des standards actuels dans l'animation Japonaise… Un conseil, passé outre.

Cette première partie de la série télévisée de Golgo 13 est une excellente découverte pour ma part. Formula-show à l'ancienne et plutôt attractif, les aventures de Duke Togo sont passionnantes et quel bonheur de retrouver ce visage familier à la télévision. Bien sûr la complexité des intrigues du manga de Takao Saitô et les explications sur les relations internationales complexes sont impossible à faire tenir en vingt minutes, les producteurs ont du opter pour de l'action avant tout. Si vous en avez marre des séries produites actuellement et que vous souhaitez retrouver des animés "à l'ancienne", je ne peux que vous conseiller d'acquérir cette oeuvre… Et n'oubliez surtout pas, "ne passez pas dans son dos, si vous tenez à la vie"

2 commentaires:

  1. La série a l'air de valoir que je lui accorde une seconde chance, du coup :)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est mon excellente surprise inattendue de cette année !! Je conseil grandement.

      Supprimer