dimanche 23 août 2015

Le Casse (1971)

Énième collaboration du duo Henri Verneuil & Jean-Paul Belmondo, Le Casse est une coproduction Franco-Italienne avec le concours de Columbia Pictures. Le long-métrage est un remake du Cambrioleur datant de 1957, réalisé par Paul Wendkos.

Adaptation de The Burglars ouvrage signé par l'Américain David "Loeb" Goodis, écrivain de roman noir. A la fin des années 30, le romancier a commencé à rédiger un grand nombre de nouvelles policières publiées dans des Pulps magazine. Apres plusieurs déménagement entre New-York & Los Angeles, l'auteur se retrouvent engagé par Universal Studio puis vient le succès en 1946 avec la publication de Cauchemar. Son adaptation Les passagers de la nuit avec Humphrey Bogart & Lauren Bacall sort l'année suivant dans les salles obscures, ce film lui permet de signer un lucratif contrat de six ans avec Warner Bros mais la plupart de ses scénarios ne dépassent pas l'étape de rédaction.


Oublié dans son pays natal, David 'Loeb" Goodis doit son succès en France grâce à l'adaptation de plusieurs de ses livres au cinéma, notamment de La Course du Lièvre à Travers les Champs de René Clément ou Tirez sur le Pianiste par François Truffaut en 1960, dont c'est le deuxième long-métrage.

Pour l'anecdote, dans sa biographie Ma vie sans maquillage aux Éditions Zélie, le maquilleur attitré et ami de Jean-Paul Belmondo, Charly Koubesserian se charge, pour les besoins du film d'Henri Verneuil, de lui confectionner une plaie sur l'arcade sourcilière. Au cours d'une scène d'action, l'acteur se blesse grièvement la cuisse avec une barre de fer.

"Une ambulance l'a sur-le-champ transporté aux urgences de l'hôpital de Créteil, se souvient Koubesserian. Là, les médecins se sont penchés sur son cas. Il fallait nettoyer la plaie au plus vite car la barre de fer était rouillée. Mais ces professionnels, dès qu'ils ont vu Belmondo arriver, ont d'abord voulu lui soigner l'arcade sourcilière dont l'apparence les inquiétait beaucoup. J'avais beau leur dire que c'était du maquillage, ils ne me croyaient absolument pas. Et pendant ce temps, la cuisse de Belmondo continuait à saigner. Alors, je me suis approché de son visage et d'un coup sec j'ai arraché le maquillage puis j'ai appuyé sur l'arcade pour prouver mes dires. Constatant que je ne leur avais pas menti, les médecins ont daigné s'occuper de la cuisse blessée !".


Suite après de l'immense succès du Casse, Jean-Paul Belmondo, tout comme Alain Delon l'a fait avant lui, décide de devenir producteur de ses longs-métrages.

Quatre Malfrats organisent un cambriolage au domicile du richissime Monsieur Tasko, à Athènes. Les malfaisants neutralisent le gardien de la villa puis grâce à leur matériel ultra-sophistiqué parviennent à ouvrir le coffre-fort, dérobant ainsi une somptueuse collection d'émeraudes. Un policier passe à coté de cette fameuse résidence, repère la voiture des brigands garée à proximité… Azad, l'un d'eux, sort de la résidence, feint une panne de voiture, mais l'agent des forces de l'ordre ne croit guère à sa version des faits et laisse partir le cambrioleur, le véritable but de l'inspecteur Zacharia est de récupérer pour son compte personnel la collection de pierre précieuse. S'ensuit alors un formidable jeu du chat et de la souris…


Le Casse commence avec une introduction quasiment muette d'un quart d'heure à la manière d'un Jean-Pierre Melville. Attention tout de même nous ne sommes pas devant un "film de braquage" à proprement parlé, le titre reste trompeur - Le cambriolage dure vingt minutes environ. Henri Verneuil nous offre une cavale façon "gendarme et voleur", entre un policier ripoux et un groupe de cambrioleur.

La mise-en-scène reste digne du cinéaste, possédant de très jolies plans, de l'idée, de l'imagination jamais débordante et toujours brutale d'efficacité. Le Casse est un film viril un bon petit polar sans prétention, une honnête Série-B… Les différents personnages ont une écriture simpliste, seule Nicole Calfan échappe à cette platitude, grâce à une touche de sensibilité et d'humanité… Et comment ne pas tomber sous le charme de la comédienne ?



Au menu le réalisateur nous propose : De belles cascades avec Bébel - il dévale une pente suite au dépôt d'un camion-benne -, un rythme rehaussé par moment par des scènes d'anthologie, notamment l'une des plus mémorables course-poursuites en voitures orchestré par l'équipe de Rémy Julienne celle-ci dure à l'écran une dizaine de minutes, puis une autre en bus, dans les rues du Pirée ou d'Athènes. Les bolides c'est bien mais n'oublions pas la bagarre homérique au bord d'une piscine pour récupérer sa future dulcinée ou le passage tendu autour de la table de ping-pong et cette séquence géniale où Jean-Paul Belmondo gifle Dyan Cannon dans son appartement, où la lumière de la pièce s'allume / s'éteint à mesure des gifles "Une tape ça s'éteint, deux tapes ça s'allume".

La confrontation au restaurant entre Azad et Zacharia, est succulente, très bien dialoguée, où Jean-Paul Belmondo mélange la nourriture et le business dans sa conversation avec Omar Sharif. A ce titre, le duel entre les deux comédiens tient ses promesses tout le long du long-métrage.

À noter que le directeur de la photographie est Claude Renoir, membre de l'illustre famille du peintre Auguste Renoir, dont il est le petit-fils. Son père est l'acteur Pierre Renoir & il est le neveu de l'immense réalisateur Jean Renoir (Le Fleuve, La bête humaine, La grande Illusion, La règle du jeu…).

Henri Verneuil (au milieu) entouré des comédiens, Jean-Paul Belmondo, Omar Sharif,
Robert Hossein & Renato Salvatori.

Jean-Paul Belmondo est très sérieux, un peu désinvolte, nous sommes loin du Bébel sur-joué des années 80 dans son interprétation. Robert Hossein est sobre en acolyte d'Azad. Quand à Omar Sharif, le comédien incarne Zacharia un policier ripoux, sadique et impassible, Henri Verneuil le gratifie même d'un passage à cheval, où l'on se croirait dans Lawrence d'Arabie… D'ailleurs l'acteur ajoute une nouvelle nationalité à sa longue filmographie, ici il est Grec. 

La bande-originale d'Ennio Morricone, dirigée par Bruno Nicolai, est formidable, très dissonante et étrange, similaire à ses travaux expérimentaux pour les giallos. Sa composition résonne ainsi longtemps dans nos petits crânes après la projection. 

Même si son scénario n'est pas le plus abouti dans les grandes lignes, le long-métrage d'Henri Verneuil fourmille d'idées et de scènes originales. Le Casse reste ludique et le spectateur passe un agréable moment devant. Une honnête Série-B injustement méconnu du grand-public, avec un méchant charismatique et des courses poursuites groovy. De l'excellent cinéma de genre Français.

Affiche Italienne.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire